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<title>http://www.grabmybooks.com</title>
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<h2 class="calibre1">Chapitre 16</h2>
<p class="calibre2"><i class="calibre3">Ce chapitre est dédié à Booksmith à San Francisco, qui niche dans le fameux quartier<br class="calibre4"/>de Haight-Ashbury, à quelques pas du Ben and Jerry du croisement de Haight et Ashbury.<br class="calibre4"/>Les gens de Booksmith savent vraiment comment on organise une scéance avec un auteur —<br class="calibre4"/>quand je vivais à San Francisco, je descendais tout le temps pour écouter les écrivains<br class="calibre4"/>incroyables qui y prenaient la parole (William Gibson est inoubliable). Ils produisent<br class="calibre4"/>aussi de petites cartes à échanger dans le style des cartes de joueurs de baseball,<br class="calibre4"/>avec chaque auteurs — j’en ai deux de mes propres conférences là-bas.<br class="calibre4"/>Booksmith: 1644 Haight St. San Francisco CA 94117 USA +1 415 863 8688At</i></p>
<p class="calibre2">D’abord, ma mère a eu l’air choquée, puis scandalisée, et à la fin elle a renoncé<br class="calibre4"/>complètement et a simplement laissé pendre sa mâchoire pendant que je lui décrivais<br class="calibre4"/>les interrogatoires, comment je m’étais pissé dessus, le sac sur ma tête, Darryl.<br class="calibre4"/>Je lui ai montré le billet.<br class="calibre4"/>- Pourquoi ?<br class="calibre4"/>Dans ces deux syllabes, chaque récrimination que je m’étais adressé à moi-même la<br class="calibre4"/>nuit, chaque moment où j’avais manqué du courage pour dire au monde quels étaient<br class="calibre4"/>les véritables enjeux, la vraie raison pour laquelle je me battais, ce qui avait<br class="calibre4"/>réellement inspiré Xnet. J’ai inspiré.<br class="calibre4"/>- Ils m’ont dit que j’irais en prison si j’en parlais. Pas seulement pour quelques<br class="calibre4"/>jours. Pour toujours. J’étais… j’avais peur.<br class="calibre4"/>Ma mère est restée assise avec moi longtemps, sans rien dire. Et alors:<br class="calibre4"/>- Et le père de Darryl ?<br class="calibre4"/>Elle aurait aussi bien pu m’empaler une aiguille à tricotter dans la poitrine.<br class="calibre4"/>Le père de Darryl. Il avait dû penser que Darryl était mort, mort depuis longtemps.<br class="calibre4"/>Et en un sens, n’était-ce pas le cas ? Après que le DSI avait détenu quelqu’un<br class="calibre4"/>illégalement pendant trois mois, est-ce qu’ils le libéreraient jamais ? Mais<br class="calibre4"/>Zeb s’était enfui. Peut-être que Darryl sortirait aussi. Peut-être le Xnet<br class="calibre4"/>et moi parviendrions-nous à à le faire sortir.<br class="calibre4"/>- Je ne lui ai rien dit.<br class="calibre4"/>Ma mère s’est mise à pleurer. Elle ne pleurait pas facilement. C’est un trait<br class="calibre4"/>britannique. Ca rendait ses sanglots et ses hoquets bien pires à entendre.<br class="calibre4"/>- Tu vas lui dire, a-t-elle réussi à dire. Tu lui diras.<br class="calibre4"/>- Je lui dirai.<br class="calibre4"/>- Mais d’abord il faut raconter à ton père.</p>
<p class="calibre2">Mon père n’avait plus d’horaire habituel pour rentrer à la maison. Entre ses<br class="calibre4"/>consultations avec ses clients — qui avaient bien du travail maintenant que<br class="calibre4"/>le DSI engageait les start-ups de data-mining dans la péninsule — et les<br class="calibre4"/>longs trajets pendulaires jusqu’à Berkeley, il pouvait rentrer à n’importe<br class="calibre4"/>quel moment entre six heures et minuit. Ce soir-là, ma mère l’a appelé et lui<br class="calibre4"/>a dit qu’il rentrait à la maison immédiatement. Il a dit quelque chose et<br class="calibre4"/>elle a répété : immédiatement. Quand il est arrivé, nous nous étions<br class="calibre4"/>installés dans le salon avec le billet entre nous sur la table basse.<br class="calibre4"/>C’était plus facile à raconter la deuxième fois. Le secret s’allégeait. Je<br class="calibre4"/>n’ai rien embelli, je n’ai rien caché. J’ai tout avoué. J’avais entendu<br class="calibre4"/>parler de confessions mais je n’avais jamais compris avant de le faire<br class="calibre4"/>moi-même. Tenir le secret m’avait sali, avait contaminé mon esprit. Ca<br class="calibre4"/>m’avait rempli de peur et de honte. Cela m’avait transformé en tout ce<br class="calibre4"/>qu’Ange m’accusait d’être. Mon père est resté assis, raide comme un piquet<br class="calibre4"/>tout le temps, le visage de marbre. Quand je lui ai passé le billet, il<br class="calibre4"/>l’a lu deux fois avant de le reposer soigneusement. Il a secoué la tête,<br class="calibre4"/>s’est levé et s’est dirigé vers la porte d’entrée.<br class="calibre4"/>- Où est-ce que tu vas ? a demandé ma mère avec inquiétude.<br class="calibre4"/>- J’ai besoin de marcher un peu, c’est tout ce qu’il a réussi à coasser<br class="calibre4"/>d’une voix brisée.<br class="calibre4"/>Nous nous sommes entre-regardés avec gêne, ma mère et moi, et nous avons<br class="calibre4"/>attendu son retour. J’ai essayé d’imaginer ce qui devait tourner dans sa<br class="calibre4"/>tête. Il avait tant changé depuis les attentats et je savais par ma mère<br class="calibre4"/>que ce qui l’avait transformé était l’idée que j’étais mort. Il avait cru<br class="calibre4"/>que les terroristes avaient presque tué son fils et cette idée l’avait<br class="calibre4"/>affolé. Affolé suffisemment pour faire tout ce que le DSI demandait,<br class="calibre4"/>s’aligner comme un gentil petit mouton et les laisser le contrôler, le<br class="calibre4"/>diriger. Maintenant il savait que c’était le DSI qui m’avait emprisonné,<br class="calibre4"/>le DSI qui avait pris en otage les enfants de San Francisco dans Guantanamo-<br class="calibre4"/>sur-la-Baie. Ca semblait logique, maintenant que j’y pensais. Bien entendu<br class="calibre4"/>c’était à Treasure Island que j’avais été gardé. Où ailleurs irait-on avec<br class="calibre4"/>un trajet de dix minutes en bateau ? Quand mon père est rentré, il avait<br class="calibre4"/>l’air plus en colère que je l’avais jamais vu de toute ma vie.<br class="calibre4"/>- Tu aurais dû me dire !, a-t-il rugi.<br class="calibre4"/>Ma mère s’est interposée entre lui et moi.<br class="calibre4"/>- Tu blâmes la mauvaise personne, a-t-elle dit. Ce n’est pas Marcus l’auteur<br class="calibre4"/>de ce kidnapping et de cette intimidation.<br class="calibre4"/>Il a secoué la tête et tapé du pied.<br class="calibre4"/>- Je ne reproche rien à Marcus. Je sais très bien qui est à blâmer. Moi. Moi<br class="calibre4"/>et ce DSI à la con. Mettez vos chaussures et prenez vos manteaux.<br class="calibre4"/>- Où est-ce qu’on va ?<br class="calibre4"/>- Voir le père de Darryl. Ensuite on va chez Barbara Stratford.</p>
<p class="calibre2">Le nom de Barbara Stratford me disait quelque chose, mais je ne mettais pas<br class="calibre4"/>le doigt dessus. Je me suis dit qu’elle était peut-être une vieille amie<br class="calibre4"/>de mes parents, mais je n’arrivais pas à la situer. Entre-temps, j’étais<br class="calibre4"/>en route pour la maison du père de Darryl. Je ne m’étais jamais senti très<br class="calibre4"/>à l’aise près de ce vieil homme, qui avait été opérateur radio dans la<br class="calibre4"/>Marine et qui dirigeait sa maisonnée comme un navire de guerre. Il avait<br class="calibre4"/>appris le code Morse à Darryl quand il était petit, ce que j’avais toujours<br class="calibre4"/>trouvé cool. C’était un des détails auxquels j’avais su pouvoir avoir confiance<br class="calibre4"/>dans la lettre de Zeb. Mais pour chaque truc cool comme le code Morse, le père<br class="calibre4"/>de Darryl avait un règlement de discipline militaire cinglée qui semblait<br class="calibre4"/>n’avoir aucun sens, comme faire les lits au carré ou se raser deux fois par jour.<br class="calibre4"/>Ca rendait Darryl cinglé. La mère de Darryl n’avais pas non plus apprécié, et<br class="calibre4"/>était retournée dans sa famille quand Darryl avait dix ans — Darryl y passait<br class="calibre4"/>tous ses étés et ses Noëls. J’étais assis à l’arrière de la voiture, et je<br class="calibre4"/>voyais l’arrière de la tête de mon père pendant qu’il conduisait. Les muscles<br class="calibre4"/>de son cou étaient rigides et sautaient dans tous les sens alors qu’il serrait<br class="calibre4"/>les mâchoires. Ma mère maintenait sa main sur son bras, mais il n’y avait<br class="calibre4"/>personne pour me réconforter, moi. Si seulement j’avais pu appeler Ange. Ou<br class="calibre4"/>Jolu. Ou Van. Peut-être le ferais-je à la fin de la journée.<br class="calibre4"/>- Dans son esprit, il doit avoir enterré son fils, a dit mon père, alors qu’il<br class="calibre4"/>négociait les épingles à cheveux qui mènent à Twin Peaks et à la petit villa<br class="calibre4"/>que Darryl et son père partageaient.<br class="calibre4"/>Twin Peaks était dans la brume, comme c’est souvent le cas la nuit à San Francisco,<br class="calibre4"/>ce qui reflettait la lumière des phares. A chaque fois que nous prenions un virage,<br class="calibre4"/>je voyais les vallées de la ville en dessous, des bols de lumières scintillantes qui<br class="calibre4"/>défilaient dans le brouillard.<br class="calibre4"/>- C’est celle-là ?<br class="calibre4"/>- Oui, ai-je répondu, c’est ici.<br class="calibre4"/>Je n’étais pas retourné chez Darryl depuis des mois, mais j’avais passé assez de<br class="calibre4"/>temps ici sur des années pour reconnaître l’endroit insantanément. Tous les trois,<br class="calibre4"/>nous sommes restés autour de la voiture un long moment, en attendant de voir qui<br class="calibre4"/>irait sonner à la porte. A ma grande surprise, ça a été moi. J’ai sonné et nous<br class="calibre4"/>avons tous attendu en retenant à moitié notre souffle pendant une minute. J’ai<br class="calibre4"/>sonné de nouveau. La voiture du père de Darryl était dans l’allée, et nous avions<br class="calibre4"/>vu une lumière allumée dans le salon. J’étais sur le point de sonner pour la<br class="calibre4"/>troisième fois lorsque la porte s’est ouverte.<br class="calibre4"/>- Marcus ?<br class="calibre4"/>Le père de Darryl ne ressemblait plus du tout à ce dont je me souvenais. Mal rasé,<br class="calibre4"/>en peignoir et pieds nus, les ongles longs et les yeux rouges. Il avait pris du<br class="calibre4"/>poids, et un double menton flasque pendouillait sous sa mâchoire ferme de militaire.<br class="calibre4"/>Ses cheveux clairsemés étaient sales et désordonnés.<br class="calibre4"/>- Monsieur Glover, ai-je dit.<br class="calibre4"/>Mes parents remplissaient l’encadrement de la porte derrière moi.<br class="calibre4"/>- Bonsoir, Ron, a dit ma mère.<br class="calibre4"/>- Ron, a fait mon père.<br class="calibre4"/>- Vous aussi ? Qu’est-ce qui se passe ?<br class="calibre4"/>- Pourrions-nous entrer ?</p>
<p class="calibre2">Son salon faisait penser à l’un de ces reportages où des enfants abandonnés<br class="calibre4"/>se font secourir par les voisins après un mois passé enfermés : boîtes de<br class="calibre4"/>plats surgelés, cannettes de bière et de jus de fruits, bols de céréales sales<br class="calibre4"/>et piles de journaux. Il y avait une puanteur d’urine de chat, et des<br class="calibre4"/>débrits de litière crissaient sous nos pieds. Même en faisait abstraction de<br class="calibre4"/>la pisse de chat, l’odeur était incroyable, comme les toilettes d’une gare<br class="calibre4"/>routière. Le canapé était recouvert d’un drap taché et d’une paire d’oreillers<br class="calibre4"/>graisseux et les coussins avaient l’air affaissés comme si l’on avait beaucoup<br class="calibre4"/>dormi dessus. Nous sommes restés là un long moment en silence, l’embarras<br class="calibre4"/>dominant toute autre émotion. Le père de Darryl avait l’air de désirer la mort.<br class="calibre4"/>Lentement, il a écarté les draps du sofa et a dégagé l’empilement de plateaux<br class="calibre4"/>graisseux de quelques chaises, en les emportant dans la cuisine et, d’après<br class="calibre4"/>le bruit, en les jetant par terre. Nous nous sommes assis aux endroits qu’il<br class="calibre4"/>avait dégagés, et il est revenu s’asseoir avec nous.<br class="calibre4"/>- Je suis désolé, a-t-il bredouillé. Je n’ai pas vraiment de café à vous proposer.<br class="calibre4"/>Mes courses devraient être livrées demain, alors je n’ai plus grand’chose…<br class="calibre4"/>- Ron, a interrompu mon père. Ecoute. Nous avons quelque chose à te dire, et ça<br class="calibre4"/>ne va pas être facile à entendre.</p>
<p class="calibre2">Il s’est tenu assis comme une statue pendant que je parlais. Il a regardé le billet,<br class="calibre4"/>l’a lu sans avoir l’air de comprendre, puis l’a relu. Il me l’a rendu. Il tremblait.<br class="calibre4"/>- Il…<br class="calibre4"/>- Darryl vit, ai-je dit. Darryl est vivant, et prisonnier sur Treasure Island.<br class="calibre4"/>Il s’est enfoncé le poing dans la bouche et a produit un grognement atroce.<br class="calibre4"/>- Nous avons une amie, a dit mon père. Elle écrit au Bay Guardian. Une reporter<br class="calibre4"/>d’investigation.<br class="calibre4"/>C’est là que je me suis souvenu d’où venait le nom. Le Guardian, hebdomadaire gratuit,<br class="calibre4"/>se faisait souvent piquer ses reporters par le grands quotidiens et les magazines<br class="calibre4"/>Internet, mais Barbara Stratford était avec eux depuis toujours. Un vague souvenir<br class="calibre4"/>d’avoir dîné avec elle, enfant, m’est revenu.<br class="calibre4"/>- Nous y allons maintenant, a dit ma mère. Est-ce que tu veux venir, Ron ? Est-ce<br class="calibre4"/>que tu veux raconter l’histoire de Darryl ?<br class="calibre4"/>Il a enfoncé son visage dans ses mains et a inspiré profondément. Mon père a mis<br class="calibre4"/>sa main sur ses épaules, mais Monsieur Glover l’a chassée d’une secousse.<br class="calibre4"/>- Il faut que j’aille me laver, a-t-il dit. Donnez-moi une minute.<br class="calibre4"/>Monsieur Glover est redescendu transformé. Il s’était rasé et mis du gel dans les<br class="calibre4"/>cheveux, et avait revêtu un uniforme militaire immaculé avec une rangée de rubans<br class="calibre4"/>de campagne sur la poitrine. Il s’est arrêté au pied des escaliers et a fait un<br class="calibre4"/>l’a montré de la main.<br class="calibre4"/>- Je n’ai plus grand’chose de propre et présentable en ce moment. Et ceci m’a<br class="calibre4"/>paru approprié. Vous savez, au cas où elle voudrait prendre des photos.<br class="calibre4"/>Lui et mon père sont montés à l’avant de la voiture et je me suis assis à l’arrière,<br class="calibre4"/>derrière lui. De près, il sentait un peu la bière, comme si cela lui sortait par<br class="calibre4"/>les pores.</p>
<p class="calibre2">Il était minuit passé quand nous nous sommes engagés dans l’allée de Barbara<br class="calibre4"/>Stratford. Elle vivait en dehors de la ville, en bas de Mountain View, et<br class="calibre4"/>aucun d’entre nous n’a dit un mot alors que nous roulions sur la 101. Les<br class="calibre4"/>bâtiments high-tech le long de l’autoroute filaient derrière nous. C’était<br class="calibre4"/>une zone de la Baie différente de celle où je vivais, ressemblant plus à<br class="calibre4"/>l’Amérique des suburbs que je voyais parfois à la télévision. De nombreuses<br class="calibre4"/>autoroutes et des quartiers de maisons identiques, des villes sans clochards<br class="calibre4"/>poussant leurs caddies le long des trottoires — il n’y avait même pas de<br class="calibre4"/>trottoires ! Ma mère avait téléphoné à Barbara Stratford pendant que nous<br class="calibre4"/>avions attendu que Monsieur Glover redescende. La journaliste était<br class="calibre4"/>endormie, mais ma mère était tellement remontée qu’elle en avait oublié<br class="calibre4"/>toute l’étiquette britannique et l’embarras de la réveiller. A la place,<br class="calibre4"/>elle lui a simplement dit, avec de la tension dans la voix, qu’elle avait<br class="calibre4"/>quelque chose à dire et que cela devait se faire en personne. Alors que<br class="calibre4"/>nous roulions vers la maison de Barbara Stratford, ma première impression a<br class="calibre4"/>été que c’était comme chez Brady Bunch — une villa basse avec un muret de<br class="calibre4"/>briques et une pelouse soignée, parfaitement carrée. Il y avait une sorte de<br class="calibre4"/>décoration abstraite sur le muret, dont dépassait une vieille antenne de<br class="calibre4"/>télévision Ultra-haute fréquence. Nous nous sommes avancés vers l’entrée et<br class="calibre4"/>avons vu que la lumière était déjà allumée à l’intérieur. La journaliste a<br class="calibre4"/>ouvert la porte avant que nous ne puissions sonner. Elle avait environ l’âge<br class="calibre4"/>de mes parents, une grande femme élancée avec un nez aquilin et des yeux<br class="calibre4"/>rusés ridés de pattes d’oies. Elle portait une paire de jeans assez à la<br class="calibre4"/>mode pour qu’il y en ait dans les boutiques de Valencia Street, et une<br class="calibre4"/>blouse indienne ample en coton qui lui tombait sur les cuisses. Elle portait<br class="calibre4"/>de petites lunettes rondes qui a jeté des reflets dans la lumière de l’allée.<br class="calibre4"/>Elle nous a lancé un petit sourire serré.<br class="calibre4"/>- Je vous que vous être venus avec toute la tribu.<br class="calibre4"/>Ma mère a acquiescé.<br class="calibre4"/>- Vous allez comprendre dans une minute, a-t-elle répondu.<br class="calibre4"/>Monsieur Glover a émergé de derrière mon père.<br class="calibre4"/>- Et vous avez fait venir la Marine ?<br class="calibre4"/>- Toute chose en son temps.<br class="calibre4"/>Nous nous sommes présentés l’un après l’autre. Elle avait une poignée de main<br class="calibre4"/>ferme et de longs doigts. Sa maison était meublée en style japonais minimaliste,<br class="calibre4"/>avec seulement quelques meubles bas et proportionnés avec précision, de grands<br class="calibre4"/>pots de fleurs en terre cuite avec des bambous qui brossaient le plafond, et<br class="calibre4"/>quelque chose qui ressemblait à une grande pièce de moteur diesel rouillée<br class="calibre4"/>montée sur une poutre de marbre poli. J’ai décisé que ça me plaisait. Le sol<br class="calibre4"/>était en vieux bois, sablé et verni, mais non homogénéisé, de sorte que l’on<br class="calibre4"/>voyait les craquelures et les trous sous le vernis. J’ai beaucoup aimé ça,<br class="calibre4"/>particulièrement quand j’ai marché dessus en chaussettes.<br class="calibre4"/>- Le café va être prêt, a-t-elle annoncé. Qui en veut ?<br class="calibre4"/>Nous avons tous levé la main. J’ai lancé un regard de défi à mes parents.<br class="calibre4"/>- Bien, a-t-elle dit.<br class="calibre4"/>Elle a disparu dans l’autre pièce et en est revenue un moment après en portant<br class="calibre4"/>un plateau de bambou grossier avec une thermore de deux litres et six tasses<br class="calibre4"/>d’un design précis mais décorées grossièrement et imparfaitement. J’ai aussi<br class="calibre4"/>aimé ça.<br class="calibre4"/>- Bien, a-t-elle dit après avoir versé le café et distribué les tasses. Je suis<br class="calibre4"/>heureuse de vous revoir tous. Marcus, je pense que la dernière fois que je t’ai<br class="calibre4"/>vu, tu devais avoir sept ans. Si ma mémoire est bonne, tu étais très enthousiasmé<br class="calibre4"/>par tes nouveaux jeux vidéo, que tu m’avais montrés.<br class="calibre4"/>Je n’en n’avais aucun souvenir, mais ça ressemblait effectivement au genre de<br class="calibre4"/>choses que je faisait à sept ans. Ce devait être ma Séga Dreamcast. Elle a<br class="calibre4"/>sort un enregistreur, un carnet jaune et un crayon, et a taillé le crayon.<br class="calibre4"/>- Je suis ici pour écouter tout ce que vous voudrez me dire, et je puis vous<br class="calibre4"/>promettre de l’entendre en toute confidentialité. Mais je ne peux pas vous<br class="calibre4"/>promettre d’en faire quoi que ce soit, ou de le publier.<br class="calibre4"/>Son ton m’a fait comprendre que ma mère avait obtenu une sacré faveur en<br class="calibre4"/>sortant cette femme du lit, amie ou pas. Ce doit être le genre d’ennuis que<br class="calibre4"/>l’on a à être journaliste d’investigation. Il devait y avoir un million<br class="calibre4"/>de gens qui auraient voulu qu’elle embrasse leur cause. Ma mère m’a fait un<br class="calibre4"/>geste du menton. Bien que j’aie raconté l’histoire trois fois déjà cette nuit,<br class="calibre4"/>je me suis retrouvé muet. C’était différent que de raconter à mes parents.<br class="calibre4"/>Différent que de raconter au père de Darryl. Là… là, nous allions jouer<br class="calibre4"/>un nouveau coup dans le jeu. J’ai commené lentement, et j’ai regardé Barbara<br class="calibre4"/>prendre des notes. J’ai bu une tasse de café rien qu’à expliquer en quoi<br class="calibre4"/>consistait l’ARG et comment je faisais le mur pour y jouer. Mes parents et<br class="calibre4"/>monsieur Glover ont écouté cette partie avec beaucoup d’attention. Je me suis<br class="calibre4"/>reservi du café et l’ai bue en expliquant comment nous avions été capturés.<br class="calibre4"/>D’ici à ce que j’aie fini mon histoire, j’avais syphoné toute la thermos et<br class="calibre4"/>j’avais besoin d’uriner comme un cheval de course. La salle de bain était<br class="calibre4"/>aussi nette que le salon, avec un savon brun et organique qui sentait comme<br class="calibre4"/>de la terre propre. Je suis retourné au salon, où j’ai trouvé les adultes qui<br class="calibre4"/>me regardaient sans mot dire. Monsieur Glover a ensuite raconté son histoire<br class="calibre4"/>à lui. Il ne savait rien de ce qui s’était passé, mais il a expliqué qu’il<br class="calibre4"/>était un ancien combattant et que son fils était un bon garçon. Il a raconté<br class="calibre4"/>ce que l’on ressent à croire que son fils est mort, comment son ex-femme<br class="calibre4"/>avait eu un malaise quand elle l’avait appris et fini à l’hôpital. Il a<br class="calibre4"/>pleuré un petit peu, sans honte, les larmes coulant le long de son visage<br class="calibre4"/>ridé pour assombrir le col de son uniforme de soirée. Quand tout a été dit,<br class="calibre4"/>Barbara est sortie dans une autre chambre et en est revenue avec un bouteille<br class="calibre4"/>de whisky irlandais.<br class="calibre4"/>- C’est un Bushmills vieilli 15 ans dans un ancien fût de rhum, a-t-elle<br class="calibre4"/>annoncé en disposant quatre verres.<br class="calibre4"/>Pas de verre pour moi.<br class="calibre4"/>- On n’en n’a pas vendu depuis dix ans. Je pense que c’est un bon moment<br class="calibre4"/>pour le déboucher.<br class="calibre4"/>Elle a versé à chacun un petit verre de la liqueur, a levé le sien et l’a<br class="calibre4"/>siroté, vidant d’un coup la moitié du verre. Les autres adultes en ont fait<br class="calibre4"/>autant. Ils ont encore bu et fini leurs verres. Elle leur a versé encore du<br class="calibre4"/>whisky.<br class="calibre4"/>- Bon, a-t-elle repris. Voilà ce que je peux vous dire en l’état des choses.<br class="calibre4"/>Je vous crois. Pas seulement parce que je vous connais, Lillian. L’histoire<br class="calibre4"/>sonne juste, et elle correspond à des rumeurs que j’ai recueuillies. Mais je<br class="calibre4"/>ne vais pas pour autant vous croire sur parole. Je vais enquêter sur chacun<br class="calibre4"/>des détails que vous m’avez donnés, chaque élément de vos vies et de vos<br class="calibre4"/>histoires. Je dois savoir s’il y a quelque chose que vous ne m’auriez pas dit,<br class="calibre4"/>quoi que ce soit qui puisse s’utiliser pour vous discréditer après que cette<br class="calibre4"/>affaire se mette en lumière. Il me faut tout. Ca pourrait me prendre des<br class="calibre4"/>semaines avant que je sois prête à publier. Tu vas aussi devoir penser à ta<br class="calibre4"/>sécurité et à celle de Darryl. S’il est vraiment un prisonnier fantôme,<br class="calibre4"/>mettre la pression sur le DSI pourrait les inciter à le tranférer encore plus<br class="calibre4"/>loin. Pensez à la Syrie. Ils pourraient même faire encore pire.<br class="calibre4"/>Elle a laissé l’idée plâner. Elle voulait dire qu’ils pourraient le tuer.<br class="calibre4"/>- Je vais emporter cette lettre et la scanner maintenant. Je veux des<br class="calibre4"/>photographies de vous deux, maintenant et plus tard — nous pouvons<br class="calibre4"/>envoyer un photographe, mais je veux documenter tout ceci aussi complètement<br class="calibre4"/>que possible dès cette nuit.<br class="calibre4"/>Je suis allé avec elle dans son bureau pour scanner le document. Je m’attendais<br class="calibre4"/>à un ordinateur stylé et peu gourmand, mais en fait, la chambre d’amis/bureau<br class="calibre4"/>était remplie de PCs dernier cri, de grands moniteurs à écrans plats, et d’un<br class="calibre4"/>scanner assez grand pour y étendre un journal déplié. Et elle était rapide<br class="calibre4"/>avec son équipement, aussi. J’ai noté avec approbation qu’elle utilisait<br class="calibre4"/>ParanoidLinux. Cette dame prenait son travail au sérieux.<br class="calibre4"/>Les ventilateurs de l’ordinateur produisaient un écran de bruit blanc efficace,<br class="calibre4"/>mais même alors, j’ai fermé la porte et je me suis rapproché d’elle.<br class="calibre4"/>- Hum, Barbara ?<br class="calibre4"/>- Oui ?<br class="calibre4"/>- Ce que vous disiez à propos de ce qui pourrait me discéditer ?<br class="calibre4"/>- Oui ?<br class="calibre4"/>- Ce que je vous dirais, on ne pourrait pas vous forcer à le répéter, n’est-ce pas ?<br class="calibre4"/>- En théorie. Disons les choses comme ça : je suis allée en prison à deux reprises<br class="calibre4"/>plutôt que de dénoncer mes sources.<br class="calibre4"/>- OK, OK. Excellent. Ouah. En prison. Ouah. OK.<br class="calibre4"/>J’ai inspiré profondément.<br class="calibre4"/>- Vous avez entendu parler de Xnet ? De M1k3y ?<br class="calibre4"/>- Oui ?<br class="calibre4"/>- Je suis M1k3y.<br class="calibre4"/>- Oh, a-t-elle fait.<br class="calibre4"/>Elle a ouvert le scanner et retourné le billet pour traiter l’autre côté. Elle<br class="calibre4"/>scannait à une résolution hallucinante, 10 000 point par pouce ou encore plus,<br class="calibre4"/>et la sortie sur l’écran ressemblait à celle d’un microscope à effet tunnel.<br class="calibre4"/>- Eh bien, voilà qui donne à cette histoire une autre couleur.<br class="calibre4"/>- Ouais, ai-je fait. J’imagine que oui.<br class="calibre4"/>- Tes parents n’en savent rien.<br class="calibre4"/>- Non. Et je ne suis pas sûr que j’aie envie qu’ils sachent.<br class="calibre4"/>- C’est quelque chose que tu vas devoir décider. Il faut que j’y réfléchisse.<br class="calibre4"/>Est-ce que tu peux passer à mon bureau ? j’aimerais discuter avec toi de ce<br class="calibre4"/>que ça signifie au juste.<br class="calibre4"/>- Est-ce que vous avez une Xbox Universal ? Je pourrais apporter un installer.<br class="calibre4"/>- Oui, je suis sûre que ça peut s’arranger. Quand tu viens, dis à la réception<br class="calibre4"/>que tu es Monsieur Lebrun et que tu as rendez-vous avec moi. Ils comprendront.<br class="calibre4"/>On ne notera pas ton arrivée, toutes les bandes des caméras de sécurité seront<br class="calibre4"/>effacées, et les caméras seront désactivées jusqu’à ce que tu repartes.<br class="calibre4"/>- Ouah, a-je fait. Vous pensez comme moi.<br class="calibre4"/>Elle a souri et m’a donné une bourrade.<br class="calibre4"/>- Gamin, ça fait un sacré moment que je joue à ça. Pour le moment j’ai réussi<br class="calibre4"/>à passer plus de temps en liberté que derrière les barreaux. La paranoïa est<br class="calibre4"/>mon alliée.</p>
<p class="calibre2">J’étais comme un zombie le lendemain à l’école. J’avais dormi trois heures au<br class="calibre4"/>total, et même avec trois tasses de la boue à la caféine du Turc n’avaient pas<br class="calibre4"/>réussi à faire démarer mon cerveau. L’ennui avec la caféine, c’est qu’on s’y<br class="calibre4"/>habitue trop facilement, de sorte qu’il faut des doses de plus en plus élevées<br class="calibre4"/>pour ne serait-ce que dépasser la norme. J’avais passé la nuit à ruminer sur ce<br class="calibre4"/>que j’avais à faire. C’était comme courir à travers un labyrinthe de petits<br class="calibre4"/>passages tordus, tous semblables, chacun menant au même cul-de-sac. Quand je<br class="calibre4"/>serais allé chez Barbara, ce serait terminé pour moi. C’était le résultat, de<br class="calibre4"/>quelque façon que j’y pense. Le temps que la journée d’école soit finie, tout<br class="calibre4"/>ce que je voulais était rentrer chez moi et me rouler dans mon lit. Mais j’avais<br class="calibre4"/>rendez-vous au Bay Guardian, sur le bord de mer. J’ai gardé les yeux rivés sur<br class="calibre4"/>mes pas en passant le portail, mais quand j’ai tourné dans la 24ème rue, une<br class="calibre4"/>autre paire de pas s’est mise en rythme avec les miens. J’ai reconnu les<br class="calibre4"/>chaussures et je me suis arrêté.<br class="calibre4"/>- Ange ?<br class="calibre4"/>Elle avait l’air dans le même état que moi. Elle n’avait pas assez dormi,<br class="calibre4"/>ses yeux ressemblaient à ceux d’un raton-laveur, et sa bouche avait des rides<br class="calibre4"/>tristes aux commissures.<br class="calibre4"/>- Salut, toi, a-t-elle fait. Surprise ! J’ai filé à l’anglaise du lycée. Je<br class="calibre4"/>n’arrivais pas à me concentrer de toute manière.<br class="calibre4"/>- Hum, ai-je fait.<br class="calibre4"/>- Boucle-la et prends-moi dans tes bras, crétin.<br class="calibre4"/>C’est ce que j’ai fait. C’était bon. Mieux que bon. C’était comme si je m’était<br class="calibre4"/>amputé d’une partie de moi et qu’on l’avait rattachée.<br class="calibre4"/>- Je t’aime, Marcus Yallow.<br class="calibre4"/>- Je t’aime, Angela Carvelli.<br class="calibre4"/>- OK, a-t-elle dit en brisant l’étreinte. J’ai bien aimé ton billet sur pourquoi<br class="calibre4"/>tu ne brouilles pas. Je peux respecter ça. Maintenant, qu’est-ce que tu as fait<br class="calibre4"/>pour trouver une façon de brouiller sans se faire prendre ?<br class="calibre4"/>- Je suis en route pour voir une journaliste d’investigation qui va publier une<br class="calibre4"/>histoire sur la façon dont on m’a mis en prison, comme j’ai lancé Xnet, comment<br class="calibre4"/>Darryl est détenu illégalement par le DSI dans une prison secrète sur Treasure<br class="calibre4"/>Island.<br class="calibre4"/>- Oh.<br class="calibre4"/>Elle a regardé autour d’elle un moment.<br class="calibre4"/>- Tu n’as rien pu trouver d’un peu, tu sais, ambitieux ?<br class="calibre4"/>- Tu veux venir avec moi ?<br class="calibre4"/>- Je viens, oui. Et j’aimerais bien que tu m’expliques tout ça en détail, si<br class="calibre4"/>tu veux bien.<br class="calibre4"/>Après toutes les répétitions, celles-ci, narrée alors que nous marchions vers<br class="calibre4"/>Potrero Avenue en descendant la 15ème rue, a été la plus facile. Elle m’a tenu<br class="calibre4"/>la main et l’a serrée souvent. Nous sommes montés quatre à quatre dans les<br class="calibre4"/>escaliers des bureaux du Bay Guardian. Mon coeur battait la chamade. Je suis<br class="calibre4"/>allé au bureau de la réception et j’ai dit à la fille blasée qui trônait<br class="calibre4"/>derrière :<br class="calibre4"/>- Je suis venu voir Barbara Stratford. Je m’appelle Levert.<br class="calibre4"/>- Vous voulez dire Lebrun ?<br class="calibre4"/>- Oui, ai-je fait en rougissant. Lebrun.<br class="calibre4"/>Elle a fait quelque chose sur son ordinateur et a dit :<br class="calibre4"/>- Prenez un siège. Barbara va être ici dans instant. Puis-je vous offrir<br class="calibre4"/>quelque chose à boire ?<br class="calibre4"/>- Du café, avons-nous réclamé à l’unission.<br class="calibre4"/>Une autre raison d’adorer Ange : nous étions acros à la même drogue.<br class="calibre4"/>La réceptionniste — une jolie femme latino qui n’avait que quelques années<br class="calibre4"/>de plus que nous, habillée de vêtements tellement vieux qu’ils en avaient l’air<br class="calibre4"/>hipster-rétro — a acquiescé et est revenue avec deux tasses frappées du sceau<br class="calibre4"/>du journal. Nous avons siroté en silence, en regardant les visiteurs et les<br class="calibre4"/>reporters aller et venir. Finalement, Barbara est venue nous recevoir. Elle<br class="calibre4"/>portait pratiquement les mêmes vêtements que la nuit de la veille. Ca lui allait<br class="calibre4"/>bien. Elle a haussé un sourcil quand elle a vu que j’étais venu accompagné.<br class="calibre4"/>- Bonjour, ai-je dit. Voici…<br class="calibre4"/>- Madame Lebrun, a dit Ange en tendant la main.<br class="calibre4"/>Oh, oui, évidemment, nous identités étaient secrètes.<br class="calibre4"/>- Je travaille avec Monsieur Levert.<br class="calibre4"/>Elle m’a donné un léger coup de coude.<br class="calibre4"/>- Dans ce cas, allons-y, a dit Barbara en nous entraînant dans une salle de<br class="calibre4"/>conférence aux long murs de verre dont les rideaux étaient tirés.<br class="calibre4"/>Elle a disposé un plateau de clones d’Oréos Whole Foods, un enregistreur<br class="calibre4"/>numérique, et un nouveau carnet jaune.<br class="calibre4"/>- Voulez enregistrer vous aussi ? a-t-elle demandé.<br class="calibre4"/>Je n’avais pas réfléchi jusque-là. Ceci dit, je comprenais en quoi ça<br class="calibre4"/>aurait été utile au cas où j’aurais voulu contester ce qu’avait dit Barbara.<br class="calibre4"/>Néanmoins, si je ne pouvais pas lui faire confiance à elle pour me faire<br class="calibre4"/>justice, tout était fichu de toute manière.<br class="calibre4"/>- Non merci, ça ira bien comme ça, ai-je fait.<br class="calibre4"/>- Bien, alors allons-y. Jeune fille, je m’appelle Barbara Stratford et je suis<br class="calibre4"/>journaliste d’investigation. J’ai cru comprendre que vous savez pourquoi je<br class="calibre4"/>suis ici, et je serais curieuse de savoir pourquoi vous êtes ici vous-même.<br class="calibre4"/>- Je travaille avec Marcus sur le Xnet, a-t-elle dit. Connaissez-vous mon nom ?<br class="calibre4"/>- Non, pas pour le moment, a répondu Barbara. Vous pouvez rester anonyme si vous<br class="calibre4"/>le désirez. Marcus, je t’ai demandé de me raconter cette histoire parce que j’ai<br class="calibre4"/>besoin de savoir comment elle interfère avec l’histoire que tu m’as racontée<br class="calibre4"/>à propos de ton ami Darryl et du billet que tu m’as montré. Je pense que ceci<br class="calibre4"/>ferait une bonne adjonction. Je pourrais présenter toute cette histoire comme<br class="calibre4"/>l’origine de Xnet. « Ils se sont fait un ennemi qu’ils n’oubliront jamais »,<br class="calibre4"/>ce genre de choses. Mais pour être franche, je préférerais ne pas<br class="calibre4"/>raconter cette histoire si ça n’est pas absolument nécessaire. Je préfèrerais<br class="calibre4"/>un reportage bien claire sur la prison secrète à côté de chez nous, sans<br class="calibre4"/>devoir discuter si les prisonniers qui y sont détenus sont du genre à n’en sortir<br class="calibre4"/>que pour établir des mouvements clandestins qui déstabilisent le gouvernement<br class="calibre4"/>fédéral. Je suis sûre que vous me comprenez.<br class="calibre4"/>Je comprenais. Si Xnet rentrait dans l’histoire, il se trouverait des gens<br class="calibre4"/>pour dire, vous voyez, il faut bien embastiller ces gens, sinon ils vont<br class="calibre4"/>fomenter des émeutes.<br class="calibre4"/>- C’est votre spectacle, ai-je dit. Je pense qu’il faut raconter au monde<br class="calibre4"/>l’histoire de Darryl. Quand vous aurez fait ça, ça communiquera au DSI que<br class="calibre4"/>j’aurai parlé publiquement, et ils me pourchasseront. Ils trouveront peut-être<br class="calibre4"/>que je suis impliqué dans Xnet. Peut-être mêm qu’ils feront le rapport entre<br class="calibre4"/>moi et M1K3y. En fait, ce que je veux dire, c’est que quoi qu’il arrive, à<br class="calibre4"/>partir du moment où vous publierez quelque chose sur Darryl, tout sera fini<br class="calibre4"/>pour moi. Je me suis réconcilié avec cette idée.<br class="calibre4"/>- L’agneau de Dieu venu laver les pêchés des hommes, a-t-elle fait. Bien. Dans<br class="calibre4"/>ce cas, c’est entendu. Je veux que vous me racontiez tous les deux tout ce que<br class="calibre4"/>vous pouvez sur la façon dont Xnet a été fondé et comme ils opère, et ensuite<br class="calibre4"/>je voudrai une démonstration. A quoi vous l’utilisez ; qui d’autre l’utilise ;<br class="calibre4"/>comment il s’étend ; qui a écrit les logiciels ; tout.<br class="calibre4"/>- Ca va prendre un moment, a fait Ange.<br class="calibre4"/>- J’ai tout mon temps, a dit Barbara.<br class="calibre4"/>Elle a bu un peu de café et mangé une imitation d’Oréo.<br class="calibre4"/>- Ce pourrait bien être le reportage le plus important de la Guerre contre<br class="calibre4"/>le Terrorisme. Ca pourrait être une histoire à faire tomber le gouvernement.<br class="calibre4"/>Quand on tourve une histoire comme ça, on la traite avec beaucoup de soin.</p>
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